L’earn out : ne faites pas cette bêtise !

L’earn out est une clause de complément de prix souvent utilisée dans le cadre d’une reprise d’entreprise. Pourtant, il ne faut pas (toujours) s’en servir. Je vous explique mon point de vue.

La clause d’earn out pour une vente parfaite… ou pas

On effectue une vente parfaite lorsque le vendeur et l’acquéreur sont d’accord sur la chose et le prix, que le premier reçoit bien son paiement et que le second reçoit bien la chose. Lors de la contractualisation de cette vente, on ajoute une clause bonus grâce à laquelle le cédant va toucher de l’argent si une performance économique future est générée.

Prenons le contexte actuel de la crise du coronavirus. Les performances économiques de l’entreprise étant dégradées, son prix de vente va être minoré. Cependant, on présuppose que les conditions économiques et les performances de la société vont revenir à la normale. Si tel est le cas – il y a de fortes probabilités que ce le soit –, le cédant reçoit un paiement supplémentaire de l’acquéreur. Cela permet de réaliser la cession sur une base future. Mais en réalité, c’est une erreur d’analyse.

La majorité des repreneurs se trompent d’objectif

Quand on reprend une entreprise, l’objectif n’est pas de revenir à la situation antérieure, mais d’aller chercher des performances économiques largement supérieures à ce qu’elles étaient par le passé. Sinon, on fait comme 98 % des repreneurs qui ne recherchent pas de croissance et de fait sont étouffés par la dette de l’entreprise.

Dans les cas classiques, on valorise les entreprises de la façon suivante :

Prenons le calcul le plus communément admis qui est celui de l’EBE, l’excédent brut d’exploitation. En multipliant par 2, 3, 4, 5 L’EBE on obtient une valeur de cession qui doit permettre de rembourser la banque tout en se payant. Le plus souvent, on se met d’accord sur le prix mais pour que le poids de la dette n’étouffe pas l’entreprise, il faut au moins 30 % d’apport de façon à pouvoir payer la banque avec une valorisation assez importante de l’entreprise. Je ne raisonne jamais comme ça.

Raisonner différemment pour créer de la valeur

Quand je reprends une entreprise, c’est pour les motifs suivants :

  •  elle possède un potentiel ;
  •  je peux développer quelque chose qui n’a pas encore été fait ;
  •  je vais pouvoir accroître rapidement la valeur et la rentabilité économique de l’entreprise.

Ces points passent souvent par une augmentation du chiffre d’affaires. Il existe des cas assez rares dans lesquels on va trouver un « loup » dans la gestion qui va nous permettre de réaliser cette augmentation de rentabilité, mais ce n’est pas ce que je favorise.

Je préconise plutôt l’upgrade, c’est-à-dire une création de valeur additionnelle qui n’a pas été pensée ou qui a été envisagée, mais pas encore mise en œuvre par le cédant. Dans ce cas, on se rend très vite compte que l’earn out est inutile.

Pourquoi l’earn out ne sert à rien ?

La clause d’earn out ne sert absolument à rien, car quoi qu’il arrive, je vais atteindre la performance économique. Mon objectif est de multiplier la rentabilité de l’entreprise, autrement dit son résultat net, par 4 et d’avoir un cash-flow très important. C’est ce qui va permettre de faire tourner la société par elle-même, sans apport personnel ou bancaire.

Par exemple, dans le secteur du tourisme, quand survient une période de confinement, je ne suis pas stressé. Je sais que je peux tenir deux ans sans que mon entreprise ne soit mise en difficulté parce que j’ai un matelas de trésorerie conséquent. Ce montant de sécurité, je le crée toujours par l’entreprise elle-même et non par de l’argent que je vais injecter ou du besoin en fonds de roulement financé par la banque.

Grâce à l’upgrade, qui va très souvent générer une augmentation du chiffre d’affaires, on vise véritablement la rentabilité économique. Tous les indicateurs – chiffre d’affaires (CA), EBE, rentabilité – vont être multipliés : le CA au minimum par 2, la rentabilité de 4 à 7. Alors, quel intérêt à créer une clause d’earn out qui va être de la négociation inutile et de la perte d’énergie ?

Du côté du cédant, il aura l’impression de faire un grand pas, puisqu’il touchera une somme moins importante avec une prise de risque. Du côté de l’acheteur, vous penserez avoir obtenu quelque chose, alors qu’en réalité, vous n’aurez rien gagné du tout vu que cette clause d’earn out, vous allez devoir la payer.

Les deux façons de voir la reprise d’entreprises 

  1. La méthode d’une majorité d’entrepreneurs et de repreneurs : valoriser l’entreprise, payer des annuités et se rémunérer soi-même, de façon équilibrée.
  2. Ma stratégie : cibler des entreprises avec un haut potentiel de valeur, ce que j’appelle les entreprises VIP, Very Interesting Potential. Les VIP sont celles qui ont cet inside, cette ressource latente qui promet des performances extrêmement intéressantes.

C’est un peu comme investir dans l’immobilier, mais avec des rentabilités bien meilleures. Vous voulez acheter un immeuble de rapport dans lequel il y a une grande maison pour en faire trois appartements. La maison se louerait 800 euros tandis que les trois appartements dépasseraient les 1500 euros (500 euros chacun). Dans notre cas, au lieu de faire des travaux, on va juste effectuer une action très simple, mais qui va permettre de démultiplier la rentabilité.

Ces insides sont nombreux. J’en parle dans ma dernière conférence en ligne sur la reprise d’entreprises, ma chaîne YouTube et mes podcasts, à retrouver sur vos plateformes préférées. Alors, abonnez-vous !